Suite de la 1ère partie...
Le logement : problème n° 1 des français !
Publiée en décembre, une étude du CREDOC (Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie) présentée au colloque "Classes moyennes et politiques publiques", organisé par le Centre d ’Analyse Stratégique (ex Commissariat au Plan) le 10 décembre 2007, met en évidence, entre autres aspects, le poids du logement dans les inégalités des français à l'égard du patrimoine et de l'aisance économique et l'aggravation de ces inégalités : aujourd'hui 70% des ménages dans la catégorie des "hauts revenus" sont propriétaires de leur logement (ils n'étaient que 51% en 1980), mais seulement 46% dans les "classes moyennes" et 33% dans les "bas revenus" (ils étaient respectivement 45 et 46% en 1980 !). En même temps, ils sont respectivement 48 et 55% à trouver que les dépenses de logement pèsent de plus en plus lourd dans leur budget (38 et 37% en 1980) contre 26% seulement dans les "hauts revenus" (29% en 1980)...
La livraison 2007 des enquêtes "Budget de famille", réalisées par l’INSEE tous les 5 ans, qui permettent de connaître le poids des grands postes de consommation dans le budget des ménages, fait apparaître également une nette dégradation de la question du logement : en effet, les 20% des ménages les plus pauvres y consacrent en moyenne 24,8% de leur budget, et ont vu cette proportion quasiment doubler au cours des trente dernières années, alors que cette dépense ne représente que 10,8% du budget des 20% les plus riches, soit deux fois moins, proportion restée stable au cours de la même période. L’INSEE remarque qu’en 1979, le poids du logement était pratiquement identique tout au long de l'échelle du niveau de vie, les ménages y consacrant en moyenne 12% de leurs revenus. Selon elle, l'ampleur de l'écart actuel provient en partie de ce que les foyers les plus modestes sont le plus souvent locataires, et que les loyers sociaux ne sont proportionnellement pas bon marché : alors que les 20% les plus pauvres ont en moyenne un niveau de vie quatre fois moins important que les 20% les plus riches, leurs loyers sont seulement deux fois moins élevés !
Face à cette situation, politiquement de plus en plus sensible, les gouvernements hésitent constamment entre des objectifs contradictoires, ou actionnent des leviers aux effets bénéfiques à court terme, mais pervers à plus long terme, comme les "aides à la personne" : que ce soient les aides au logement - allocation logement et APL -, les primes "épargne logement", les prêts à taux zéro (PTZ), et plus récemment le crédit d'impôt au titre des intérêts des prêts contractés pour l'habitation principale, ces mesures font du bien et sont appréciées lorsqu'elles sont instituées, mais donnant du pouvoir d'achat aux locataires et acquéreurs, elles leur permettent, sur un marché tendu par une demande supérieure à l'offre, d'accepter des prix supérieurs, ce qui alimente la hausse et annihile le bénéfice sans supprimer la charge budgétaire, qui devient alors une subvention permanente aux vendeurs et bailleurs (elle avoisinera les 14 milliards d'euros par an quand le crédit d'impôt aura atteint son rythme plein, mais la part de l'Etat ne sera que de 5,1 milliards en 2008, le reste étant assuré essentiellement par le FNAL - il faut y ajouter 2 milliards pour l'épargne logement).
En regard, les "aides à la pierre", seul vrai moyen d'assurer une offre de logement à loyers maîtrisés, sont assurées à hauteur de 1,4 milliards par des crédits de l'Etat - crédits de l'ANAH et de l'ANRU, subvention à la construction de logement social, aide au logement dans les DOM - et à hauteur de 12 milliards d'aides fiscales : 5,4 pour la TVA à taux réduit, 0,9 pour les régimes d'aide à l'investissement locatif, et le reste pour le logement social...
Faut-il craindre une baisse des prix ?
Hausse des taux d'intérêt, crédit moins facile, désolvabilisation des acquéreurs : tous les ingrédients sont là pour produire un retournement du marché, sans que quiconque puisse à ce jour prévoir s'il peut être évité par le maintien d'une demande solvable - et financée - suffisante. Faut-il le craindre ou au contraire l'espérer ?
D'un côté, une baisse de grande ampleur des prix de l'immobilier, à l'instar de ce qui s'est produit au début des années 90, favoriserait les primo-accédants, et même les propriétaires qui vendent pour acheter plus grand ou meilleur : ceux-là retrouveraient à l'achat plus que ce qu'ils perdraient à la revente ! Pour le gouvernement, confronté au problème du pouvoir d'achat des classes moyennes et modestes, ce serait une aubaine : du pouvoir d'achat créé pour pas cher !
Economiquement, l'addition pourrait cependant être lourde : fragilisation des banques et aggravation de la crise financière en raison de la baisse de valeur des gages qui garantissent les crédits immobiliers, difficultés pour de nombreux acquéreurs récents qui seront obligés de vendre en raison de changements dans leur situation personnelle, effet psychologique sur les investisseurs qui verront la valeur de leurs actifs se réduire et leurs prévisions de plus-value s'évanouir, effet général sur le moral des investisseurs qui risquent de se détourner à nouveau et pour quelques années de la "pierre" à un moment où l'immobilier privé est appelé plus que jamais à la rescousse pour palier la pénurie de l'offre de logement abordable, et alors même que la baisse des prix leur permettrait de réaliser des investissements plus rentables, effet général enfin sur le moral des consommateurs par le sentiment d'appauvrissement des millions de propriétaires !
Nul doute que les prochaines publications de chiffres sur le marché immobilier seront scrutées avec attention, et appréhension...
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