Un coup de jeune au Code de l'urbanisme...
Une ordonnance du 8 décembre 2005 et un décret d'application du 5 janvier 2007 donnent un coup de jeune au permis de construire et à l'ensemble des autorisations d'urbanisme. La réforme est entrée en vigueur le 1er octobre 2007, la date initiale, fixée au 1er juillet ayant été repoussée de 3 mois.
Notons d'abord qu'un important travail de simplification a été accompli : 11 types d'autorisations et 5 régimes de déclarations (1)sont dorénavant fusionnés en 3 permis : permis de construire, permis d’aménager et permis de démolir, et une déclaration préalable, auxquels s'appliquent les mêmes règles de fond et les mêmes règles d'instruction (délais, procédure, etc.).
De nouveaux formulaires sont disponibles (2). Ils ont pour vocation de clarifier la relation entre le demandeur et l’administration en simplifiant les formalités et en rendant le langage administratif un peu plus compréhensible du grand public.
Enfin, la réforme touche aussi les certificats d'urbanisme : les bénéficiaires d'un certificat d'urbanisme seront garantis du maintien à leur égard de l'ensemble des règles d'urbanisme existant à la date du certificat, même si elles n'ont pas été mentionnées dans le certificat.
Des délais d'instruction contraignants pour l'administration
Les délais d’instruction sont désormais garantis : un mois pour les déclarations, deux mois pour les permis de construire relatifs à des constructions individuelles et trois mois pour les autres constructions. Le délai pour les permis est celui imparti à l'administration compétente pour le délivrer ; celui pour les déclarations préalables est le délai qui lui est imparti pour notifier un refus.
Quand une consultation est obligatoire et impose un délai supplémentaire - architecte des bâtiments de France (ABF), commission de sécurité... -, celui-ci est connu au bout d’un mois. Il ne peut plus être changé après, sauf cas exceptionnels limitativement énumérés par le décret. Enfin, une liste exhaustive des pièces devant accompagner le dossier est fournie avec les nouveaux formulaires. Innovation importante : l’administration a l’obligation de réclamer toutes les pièces manquantes en une seule fois avant la fin du mois suivant le dépôt du dossier ! Ainsi, à la fin du premier mois, le demandeur connaît précisément le délai dans lequel la décision doit intervenir.
A noter que comme auparavant, la déclaration préalable ne doit en aucun cas être prise comme un simple acte déclaratif : c'est une autorisation à part entière, donnée par défaut...
Précision importante : lorsque qu'une autorisation n'a pas été donnée ou refusée dans les formes, elle est réputée acquise pour le demandeur ! On parle alors de permis "tacite". A noter que le permis tacite est quasi-généralisé, même dans les secteurs où l'accord de l'ABF est requis : dans ces secteurs, le silence de l'autorité compétente vaut permis tacite en cas d'accord express ou de silence de l'ABF. Si l'ABF émet, dans le délai qui lui est imparti, un avis défavorable ou un avis assorti de réserve, il devra notifier copie de cet avis au demandeur, en lui indiquant qu'en conséquence, il ne pourra pas bénéficier d'un permis tacite. Par contre, dans les rares cas où un permis tacite n'est pas possible, le principe est que le silence vaut refus tacite, qui est susceptible de recours et d'indemnisation, s'il est illégal...
Enfin, les conditions de retrait des autorisations sont modifiées et unifiées : l'administration disposera d'un délai de 3 mois à compter de l'intervention de la décision pour procéder à son retrait si elle est illégale. Les décisions de non opposition à une déclaration préalable ne pourront être retirées.
Des champs d'application désormais précis
Par ailleurs, le décret (3) a fixé la liste exhaustive des constructions soumises à simple déclaration et de celles qui sont dispensées de formalités. Il s'agit d'un progrès important, car auparavant la liste des travaux soumis à permis, à autorisation ou à déclaration n'était pas fixée de façon exhaustive ; en particulier la liste des petits travaux non soumis à permis n'était fournie qu'à titre indicatif...
Dorénavant, les principes suivants s'appliquent suivant qu'il s'agit de constructions nouvelles, de travaux sur constructions existantes, d'aménagements de terrains ou de démolitions :
- les constructions nouvelles sont par principe soumises à permis de construire, et le décret fixe la liste exhaustive des constructions soumises à simple déclaration et de celles qui sont dispensées de formalités ; sont notamment soumises à déclaration préalable les constructions qui créent entre 2 et 20 m2 de SHOB, et celles de moins de 2 m² qui ont une hauteur de plus de 12 mètres ; de nombreuses constructions sont dispensées de formalités, sauf dans les secteurs sauvegardés et les sites classés ; à noter que le permis de construire ne porte que sur des biens immobiliers (sont donc exclus les bateaux, péniches, caravanes, mobil-homes, camping-cars, etc.) ; le stationnement de ces derniers (caravanes, mobil-homes et camping-cars) peut en revanche être soumis à une déclaration préalable ;
- les travaux sur constructions existantes sont par principe dispensés de formalités, et le décret fixe la liste exhaustive des travaux soumis à permis de construire et de ceux qui sont soumis à une simple déclaration préalable ;
- les aménagements de terrains sont par principe dispensés de formalités, et le décret fixe la liste exhaustive des aménagements soumis à permis d'aménager et de ceux qui sont soumis à une simple déclaration préalable ; sont notamment soumis à permis d'aménager les lotissements de plus de 2 lots lorsqu'ils prévoient des voies et des espaces publics ou collectifs, ou lorsqu'ils sont situés dans un secteur sauvegardé ou un site classé ; les lotissements qui ne sont pas dans ce cas ne sont soumis qu'à déclaration préalable, quel que soit le nombre de lots ;
- les démolitions sont soumises à permis de démolir dans les secteurs protégés - secteurs sauvegardés, sites, périmètres de protection des monuments historiques, Zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), et les communes peuvent l'instituer ailleurs ; à défaut, la démolition n'est soumise à aucune formalité.
Une plus grande confiance dans les maîtres d'ouvrage et maîtres d'oeuvre
Enfin, une plus grande responsabilité est laissée aux constructeurs et à leurs architectes : lors du dépôt de la demande, de nombreux éléments de la demande deviennent déclaratifs, et le service instructeur n'a pas à assurer de vérification préalable. Parallèlement, la réforme modernise le régime du contrôle de la conformité des travaux et introduit le mécanisme suivant :
- c'est le constructeur et son architecte, dans la déclaration d'achèvement de travaux, qui certifient qu'ils ont bien respecté le permis ;
- l'autorité responsable pourra contrôler la conformité des travaux et, le cas échéant, la contester, dans un délai de 3 mois (ou 5 mois dans les secteurs protégés). Passé ce délai, elle sera réputée n'avoir pas contesté la conformité des travaux (attention, dans certains cas, le contrôle est obligatoire...) ;
- le propriétaire pourra demander à l'administration de lui en donner acte par une attestation écrite.
Egalement, l'existence d'une déclaration d'achèvement permettra de clore définitivement les délais de recours contentieux à l'encontre du permis de construire devant les tribunaux administratifs.
Un risque important de laxisme si l'administration et les mairies ne suivent pas...
Si la réforme vise à fluidifier et sécuriser les autorisations et le contrôle de conformité pour les demandeurs, elle fait dépendre fortement le respect des règles d'urbanisme de la diligence des administrations compétentes, municipales ou départementales !
Pas moins de 2 millions d'autorisations en tous genres sont délivrées chaque année en France : l'avenir dira si le délai qui leur a été imparti depuis la parution du décret, même prolongé de trois mois, aura été suffisant pour s'y préparer et surtout si elles auront dans la durée les moyens humains nécessaires pour ne pas laisser passer les délais, au niveau des permis lorsqu'ils sont requis comme au niveau du contrôle des constructions réalisées par rapport aux permis, et en particulier à l'égard des règles de sécurité !
A voir les dégâts irréversibles causés aux paysages et à l'harmonie urbaine dans les pays à réglementation moins contraignante qu'en France - ou ceux causés en France même en des époques de plus grande permissivité -, il incombera aux citoyens d'exercer une vigilance citoyenne accrue, tant à l'égard des maires lorsqu'ils exercent la compétence en matière d'urbanisme qu'à celui des D.D.E. lorsque la compétence leur est déléguée...
(1) autorisations et déclarations supprimées :
- permis de construire,
- permis de démolir,
- autorisation pour les installations et travaux divers,
- autorisation d'aménager un terrain de camping,
- autorisation de stationnement de caravanes,
- autorisation d'aménager un parc résidentiel de loisirs,
- autorisation de coupe et abattage d'arbres,
- autorisation de lotir,
- autorisation spéciale de travaux dans les secteurs sauvegardés,
- autorisation spéciale de travaux dans les périmètres de restauration immobilière,
- déclaration de travaux,
- déclaration de clôture,
- déclaration en cas de division de terrain non soumise à autorisation de lotir,
- déclaration en cas de division de terrain non destinée à l'implantation de bâtiments,
- déclaration de création d'un terrain de camping pour moins de six tentes ou de vingt campeurs.
(2) un site Internet a été mis en place pour le grand public, donnant accès aux explications sur la réforme, aux nouveaux formulaires et à leurs notices explicatives : www.nouveaupermisdeconstruire.gouv.fr
Voir aussi le tableau récapitulatif dressé par le ministère de l'équipement.
(3) décret n°2007-18 du 5 janvier 2007 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme
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